Réné Arnoul
1559/69 - 1639
L'Enfance de Réné Arnoul
1ère partie: Amours
SonnetI'auois trois fois cinq ans et trois ans dauantage
Texte:Louis de Veyrières, Monographie du sonnet:sonnettistes anciens et modernes,suivis de quatre-vingts sonnetsParis: Bachelin-Deflorenne, 1869Source: Internet ArchiveVersion digitale: Marc Szwajcer
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Sonnet.
I'auois trois fois cinq ans et trois ans dauantageQuand i'escriuis ces vers tesmoins de mon ardeur,Ie chantois pour flatter mon ingrate douleur,Et non pour esperer honneur de mon seruage.
Comme ie le sentois, ie plaignois mon dommage,Veritable poëte à mon propre malheur;Mon penser incertain me seruoit de fureur,Mon tourment de suiet, mon espoir de courage.
Pour moy seul i'ay souffert, pour moy seul i'ay chanté;Ne pouvant pas beaucoup, beaucoup te n'ay tenté;Sans fart fut mon amour, sans fart furent mes plaintes.
La loy, non le plaisir, me rendit amoureux,C'est assez qu'on me laisse, entre tant de contraintes,Faire ce que ie dois, dire ce que ie veux.
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J'avais trois fois cinq ans, et trois ans davantage Quand j'écrivis en vers, témoins de mon ardeur, Je chantais pour flatter mon ingrate douleur, Et non pour espérer honneur de mon servage.
Comme je le sentais, je plaignais mon dommage Véritable poète à mon propre malheur; Mon penser incertain me servait de fureur, Mon tourment de succès, mon espoir de courage.
Pour moi seul j'ai souffert, pour moi seul j'ai chanté; Ne pouvant pas beaucoup, beaucoup je n'ai tenté ; Sans fard fut mon amour, sans fard furent mes plaintes.
La loi, non le plaisir, me rendit amoureux; C'est assez qu'on me laisse, entre tant de contraintes Faire ce que je dois, dire ce que je veux. |