BIBLIOTHECA AUGUSTANA

 

Christine de Pizan

vers 1364 - vers 1431

 

L'Avision de Christine

 

La première partie

 

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XXIX

La fin de la complainte

de la dame couronnee

 

Belle doulce amie que te diroye ne tay ie assez tenue es narracions et proces de mes aventures le bien et le mal. je ten ay regehy en general et en particulier puis la naiscence de mon nom jusques au iour dut Et ce plus ma eslargie a te segnefier lestat de mes anuis que piteuse de mes afflictions. je tay trouves si est temps desormais que ie me seuffre de plus te dire que trop ne soye longue/ o quel plaisir et quel alegement est de dire et descouvrir a son loial ami ou amie les pesenteurs de ses pensees. car la viande presentee aux familleux nest plus savoreuse. Si ne di plus ce que autre fois as dit. quelle que iappere que glorieuse soye. car ie tacertaine se dieu de sa grace ny remedie que passe a long temps ne fus plus perplexe. helas mais comment remede du ciel espereroie quant aux miens si mal ie les voy desservir/ Et encore plus me griefve sans faille le peril de pis ou ie me voy que le mal que ie sueffre tout soye bien batue tout ainsi que cellui qui devant lui veoit cil qui la navre a paour quil le pertue/ si te mercy ma bien amee en fin de mes paroles de ta loial amour et compagnie/ la quelle te pry que ne me faille iusques a la fin non obstant que dailleurs tu soies requise/ et que de moy et des miens tu ayes petiz esmolumens/ mais ton bon courage ne vueille delaissier la nourriture de son enfance/ si demeure constante avec moy ou gracieux labour de tes dittiez* duquel maint plaisirs encore feras a moy et mes enfans. lesquelx ie te pry que me salves/ et que leur segnefies les plaines de mes clamours/ et que comme loyaulx et vrais enfans vueillent avoir pitie de leur tendre mere de qui encore le laitt leur est neccessaire et doulce nourriture/ mais vueillent si espargner ses doulces mamelles quilz ne la succent jusques au sang

Atant cesserent les paroles de la dame couronnee. Et moy apres ce que selons ma poissance au mieulx que sceus ie los reconfortee lui disant que non obstant son grant peril se dieu plaist les prieres et croisons de maintes bonnes creatures et les biens fais qui sont celebrez par sa terre/ non obstant les grans pechiez qui y queurent comme dieu soit misericors la reserveroient/ Et tireroient de peril la remerciay de lonneur que elle mavoit faitte/ Et de la charge que commise mavoit lui en promettant vraye execucion/ Et atant reposer la laissay

 

Explicit la premiere partie du livre

de lavision Christine