BIBLIOTHECA AUGUSTANA

 

Jules Laforgue

1860 – 1887

 

Le Sanglot de la terre

 

Poèmes contemporains

du «Sanglot de la Terre»

 

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LA CIGARETTE

 

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Oui, ce monde est bien plat; quant à l'autre, sornettes.

Moi, je vais résigné, sans espoir, à mon sort,

Et pour tuer le temps, en attendant la mort,

Je fume au nez des dieux de fines cigarettes.

 

Allez, vivants, luttez, pauvres futurs squelettes.

Moi, le méandre bleu qui vers le ciel se tord

Me plonge en une extase infinie et m'endort

Comme aux parfums mourants de mille cassolettes.

 

Et j'entre au paradis, fleuri de rêves clairs

Ou l'on voit se mêler en valses fantastiques

Des éléphants en rut à des choeurs de moustiques.

 

Et puis, quand je m'éveille en songeant à mes vers,

Je contemple, le coeur plein d'une douce joie,

Mon cher pouce rôti comme une cuisse d'oie.